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SIMBAD

Le voyage pour moi ce n'est pas arriver, c'est partir. C'est l'imprévu de la prochaine escale, c'est le désir jamais comble de connaitre sans cesse autre chose. C'est demain, éternellement demain ...

Louis Soutter - le grand peintre 'fou' ...

Publié le 23 Décembre 2009 par SIMBAD in PERSONNALITEES ( Personalitete )

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Louis Soutter - Tête d’homme (1930-1942),oil on paper


L'œuvre de Louis Soutter est exceptionnelle, libérée de toute influence, inclassable: l'artiste, essentiellement dessinateur, la créa au crayon et à la plume, en noir et blanc, jusqu'à ce qu'il commençât, bien forcé, à dessiner avec le doigt et ajoutât à ses silhouettes noires des touches de gouaches de couleur.

Louis Soutter est l'un des plus grands artistes suisses du XXe siècle. Son œuvre est immense, particulièrement celle de 1923 à 1942; elle comprend des milliers de dessins, dont une grande partie a disparu. L'historien d'art Michel Thévoz, auteur du catalogue raisonné de son œuvre, a répertorié environ 2.850 dessins et quelques peintures. Par son originalité, Louis Soutter était inclassable, de sorte que, incompris, rejeté par sa famille dans sa détresse et sa dépression, par la société bourgeoise et bien-pensante de la Suisse où il était né, quasiment enfermé dans un asile pour vieillards à Ballaigues pendant les dix-neuf dernières années de sa vie, il faillit rester inconnu du grand public, non seulement suisse mais international. Louis Soutter eut de son vivant le tragique privilège d'être tenu pour un anormal, ses dessins pour une production de fou. Nié dans son être, dans sa foi, sa mort, survenue en 1942, ne le délivra pas de l'ostracisme; elle y ajouta une nouvelle malédiction: cahiers et dessins tombèrent dans l'oubli.


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Louis Soutter - Trois têtes tropiques (1936)

Louis Soutter en sortit pourtant grâce à la ténacité et à la foi en son œuvre, non seulement de ses amis, Le Corbusier, Giono, Ramuz, Auberjonois, Poncet, mais grâce aux galeristes Vallotton, à d'autres galeries, à des musées, à l'étranger, grâce à l'éditeur H.L. Mermod, au conservateur de l'époque du Musée cantonal des Beaux-arts de Lausanne, Ernest Manganel et de René Berger qui fut son son successeur, et grâce encore à Michel Thévoz, auteur de plusieurs livres à son sujet, dont le premier, une monographie 'Louis Soutter ou L'écriture du désir', parut en 1974, et le deuxième 'Louis Soutter', Catalogue de l'œuvré, parut en 1976. Parutions et expositions se succédèrent ensuite.

Il sortit de l'oubli, parallèlement et de manière inattendue - qui faussa sans doute l'opinion d'une partie du grand public -, grâce au peintre français Jean Dubuffet et à l'apparition de l'Art brut, en 1945: cette année-là, Jean Dubuffet avait créé le concept de l'Art brut, auquel devait correspondre une forme d'expression d'artistes refusant d'entrer dans le système économique, dans la mercantilisassions de l'art par l'intermédiaire des galeries, des musées, des critiques d'art; devaient également en faire partie les artistes solitaires rejetant tout courant artistique, les prisonniers et, par extension, les malades, les enfants, les malades mentaux et tous ceux créant sans avoir jamais eu de formation artistique; pour Dubuffet, Louis Soutter devait donc appartenir à l'Art brut. Il envisagea de lui consacrer le premier numéro des 'Cahiers de l'Art brut', avec un texte de René Auberjonois, mais les réticences, le scepticisme de ce dernier quant à la place de Soutter dans ce mouvement firent que le projet ne se réalisa pas. Après réflexion, Dubuffet retira Soutter de l'Art brut.


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Louis Soutter - Christ (1930-1942) Galerie Haas AG

En 1970, interrogé sur l'artiste dans l'Art brut, Dubuffet écrivit, c'est un extrait: "Les docteurs de la culture veulent bien un peu de rénovation, un peu d'affranchissement à l'égard des normes, mais pas trop. Avec Soutter déjà c'est trop. Les examinateurs, en présence de cette dose d'affranchissement déjà un peu excessive, froncent le sourcil. Les médecins — gardiens de la norme — sont commis à l'examen du cas. Ils vont naturellement réprouver ces outrances, les déclarer morbides. « Psychopathiques » qu'ils vont dire, dans leur jargon grec, « schizophréniques » et tout sera dit. Disqualifié le bon Soutter, pour raison d'excès dans l'anormalité."

Louis Soutter dans l'Art brut, à ce sujet aujourd'hui encore, les avis sont partagés. Certains de ceux qui avaient rangé Louis Soutter dans l'Art Brut, dont les créateurs sont des êtres à part, comme Ferdinand Cheval dit le facteur Cheval et des malades mentaux, sans culture artistique et culturelle, que le grand public associe, les uns comme les autres, à des malades mentaux, tels, par exemple Adolf Wölfli, Aloïse Corbaz, Henry Darger, Martha Grünenwaldt, Augustin Lesage, Aleksander Pavlovitch Lobanov, ceux-là voient toujours en Louis Soutter un malade mental. D'autres l'ont rangé dans la Mouvance de l'Art brut.

L'œuvre de Soutter est exceptionnelle, libérée de toute influence, inclassable: l'artiste, essentiellement dessinateur, la créa au crayon et à la plume, en noir et blanc, jusqu'à ce qu'il commençât, bien forcé, à dessiner avec le doigt et ajoutât à ses silhouettes noires des touches de gouaches de couleur. Louis Soutter a donné une place très importante à la Femme, un être féminin à deux visages, représenté au début dans sa sensualité, sa plénitude et sa générosité, puis, le temps passant pour l'artiste, une beauté dangereuse, fatale, persécutrice, progressivement enlaidie par une haine incompréhensible, d'une laideur terrifiante à la fin. Les périodes des "cahiers", "maniériste" et "au doigt" représentent vingt et un ans de création d'une extrême richesse malgré la simplicité de ses moyens techniques.


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